Colloque "L'Etat face au pluralisme religieux : épistémologie concordataire" (mardi 20 novembre 2018)

10 octobre 2018

Nous avons la joie de vous annoncer le colloque "L'Etat confronté au pluralisme religieux : épistémologie concordataire", co-organisé avec le Centre de recherches "Droit et Sociétés Religieuses" (DSR – EA 1611) de l'Université Paris-Saclay. Ce colloque international se tiendra le mardi 20 novembre 2018 à l'Institut catholique de Paris. 

Le pluralisme religieux européen n’est, a priori, plus un simple fait – plus ou moins subi –, mais bien le fruit d’un processus politique né des sécularisations et d’une construction juridique. Ce pluralisme européen entend dès lors placer les religions à distance du politique et les traiter égalitairement par le biais de droits civils et politiques reconnus à tout citoyen indépendamment de son appartenance religieuse.

Mais la complexification constante des faits religieux, outre l’enrichissement culturel qu’elle peut induire, semblent conduire ces dernières décennies à des difficultés qui peuvent paraître insolubles. Les nouvelles réalité religieuses, en particulier liées à l’Islam, semblent remettre en cause sinon le droit ou les statuts juridiques des cultes, du moins les référents qui ont, jusqu’alors, animé les différents systèmes politico-juridiques européens. Les modèles hérités de la modernité européenne semblent en effet incapables d’accueillir ces mutations du religieux.

Par-delà la perspective libérale promouvant la liberté individuelle, le relativisme et la tolérance religieuse, se dessinent de réels mécanismes par lesquels les puissances publiques harmonisent ou concrétisent ce pluralisme religieux. En l’espèce, le concordat (et les modèles qui en découlent) a pu servir de matrice aux États européens pour mettre en œuvre ce pluralisme : entendu au sens strict le concordat est l’accord passé entre un État et le Siège apostolique en vue de définir certaines modalités d’exercice de la mission propre de l’Église catholique dans cette nation. Cependant, tout comme le terme a pu pénétrer le droit commercial contemporain, la réalité du concept concordataire a pu inspirer, consciemment ou non, les gouvernants dans l’approche du religieux ; l’exemple le plus connu étant indéniablement la politique religieuse de Napoléon.

Le concept concordataire serait donc un idéal-type du politique dans la manière de garantir ou d’ordonner le pluralisme religieux à plusieurs égards: par sa primauté chronologique dans le rapport Politique—Religieux, par son histoire européenne millénaire, par son usage – encore aujourd’hui – et son efficacité, mais encore par sa nature et sa méthode – qui sont celles du dialogue, de l’accord, de la convention, et non l’unilatéralité et de la force.

Ce pourrait donc être ce référent particulier, le concordat, qu’il conviendrait d’interroger, dans une perspective de synthèse et de mise en comparaison, pour restaurer un pluralisme religieux européen mis à mal, notamment par l’ accueil de l’ islam. Cette interrogation passe alors nécessairement par l’étude des paradigmes de nos droits européens, par leur finalité encore, mais aussi par la compréhension du discours des mouvements religieux eux-mêmes. En regard de cette épistémologie, le modèle des États musulmans apporte ici un éclairage fondamental, tant dans son édification que par le droit constitutionnel : l’étude juridique critique du pluralisme religieux européen au prisme du concordat mise en comparaison avec les institutions islamiques offre une perspective nouvelle et enrichissante.

1°. Dans un premier temps, ce colloque entend ainsi préciser le regard théologique du lien inéluctable entre le Politique et les religions. Les chrétiens ont été en l’espèce confrontés à l’injonction christique « Reddite Caesari... », les obligeant à poser clairement ce rapport au politique. Pour autant, catholiques, orthodoxes et protestants n’y apportent pas, loin s’en faut parfois, la même réponse, oscillant entre séparation et symphonie.

2°. L’étude critique et synthétique de l’institution concordataire dans une perspective historique vient ensuite éclairer la mise en œuvre du rapport politique et religion dans le long temps. En comparaison, l’âge classique de l’Islam montre une logique qui rejoint, à la fois, celle des Princes européens et, dans le même temps, s’en éloigne par l’union toujours plus étroite qui résulte entre le prince et l’institution religieuse qui lui procure sa légitimité.

3°. Nos systèmes européens définissent des statuts juridiques pour les cultes garantissant désormais un pluralisme. Dans quelle mesure ces statuts, propres à chaque État, obéissent-ils à un paradigme commun ? Cet éventuel modèle est-il encore pertinent pour aujourd’hui et, si oui, à quelles conditions ? Le phénomène religieux qui s’exprimait au sein d’institutions identifiables est concurrencé par une affiliation religieuse et une pratique plus fragmentée, voire individuelle. La puissance publique n’est donc plus confrontée seulement à une pluralité religieuse organisée, mais aussi et directement aux communautés locales voire, de plus en plus, au citoyen-croyant. Le pluralisme ne serait alors plus tant garanti dans la définition de statuts juridiques des religions, mais dans l’aménagement des droits individuels, privés et politiques.

4°. Enfin, si la notion de concordat a été pertinente dans l’élaboration moderne du pluralisme européen, on constate qu’elle continue d’évoluer dans le droit canonique qui l’a fait naître. Là encore, on assiste à un changement paradigmatique puisque les codes de droits canonique ne mentionnent plus le terme de concordat, lui préférant celui de convention et soulignant par là le caractère juridique international public de ces accords.

5°. C’est dans ce cadre que prend place l’étude du fait religieux dans un État confessionnel comme les Émirats Arabes Unis. Cet État fédéral est intéressant à différents égards quant à la question du pluralisme religieux. D’une part, parce que la citoyenneté et la pratique religieuse ne coïncident pas : la grande majorité des résidents aux EAU ne bénéficie pas de la citoyenneté émirienne ; pourtant, cela n’interdit pas la présence des faits religieux. D’autre part, parce que l’immigration dans ces États importe une pratique religieuse très forte et allogène en considération de la péninsule arabique en général.


NB : Les termes socio-philosophiques employés ici ne sont à considérer que dans leurs sens étymologiques et non dans leur appartenance à une école particulière.


Infos pratiques :

Mardi 20 novembre 2018, de 9h30 à 18h.

Institut Catholique de Paris ; entrée par le 74 rue de Vaugirard, Paris 6ème. 


Inscription :

Vous pouvez directement et gratuitement vous inscrire en ligne via le site evenbrite en cliquant ici


Programme à lire ci-dessous ou à télécharger :